Se soumettre ne serait-il pas « savoir aimer », tout simplement ?
Je vous partage un texte rédigé par ma soumise allotei.
En image de couverture : un cadeau d’anniversaire de signature de contrat offert par ma soumise allotei. Elle représente la connexion entre nous deux. Une œuvre unique réalisée par un artiste à partir d’une photo : ma soumise me faisant un baisemain BDSM.
Préambule : aussi surprenant cela puisse-être, l’écriture de ce texte est née de l’écho des paroles de Savoir aimer, de Florent Pagny.
Se soumettre ne serait-il pas « savoir aimer », tout simplement ?
Mais c’est quoi aimer ? Je n’ai pas la « vraie » réponse. Je sais juste que ce n’est pas que vibrer intérieurement, que ce n’est pas juste adorer l’Autre. Je crois qu’aimer, au fond de moi, je l’aurais d’abord défini par rapport à moi, à mes ressentis, à mes papillons dans le ventre, à mon manque quand je ne suis pas à Ses pieds. Tout partant de moi, de ce rapport égocentré, autocentré sur ce que je vis moi. Et pourtant, je sais, ou je voudrais, que l’amour ne soit pas cela. Je voudrais qu’il soit l’Autre, et uniquement l’Autre.
Du plus profond de moi-même j’aimerais arriver à cette émotion « qui se travaille » et qui amène à : « [une] résonnance positive que constitue l’amour [qui] se manifeste lorsque trois événements surviennent simultanément : le partage d’une ou plusieurs émotions positives, une synchronie entre le comportement et les réactions physiologiques de deux personnes, et l’intention de contribuer au bien-être de l’autre, intention qui engendre une sollicitude mutuelle. ». Love 2.0, Barbara Fredrickson, 2013
En d’autres mots : m’oublier pour Le vivre et ne ressentir que la pureté de Notre connexion, de cet indicible qui rend cette vie absolument extra-pas-ordinaire.
« Garder le sourire en toute occasion » – La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
Même face à l’adversité, à tous ces gens qui n’attendent que le pire, à cet accueil que Nous aimerions parfois plus chaleureux, à cette crainte permanente de « déranger » : être capable de sourire et ne plus douter. Fière de la place que je peux avoir à Ses pieds et le montrer à qui croise Notre chemin.
Le paradoxe aujourd’hui c’est que c’était plus facile avant … Avant quoi ? Avant que le temps ne vienne s’empreinter dans mon esprit, avant que je me pose toutes ces questions existentielles qui viennent naturellement après l’insouciance, après l’innocence.
Et pourtant je garde aussi ce plaisir infini de porter mon collier et de m’apercevoir que, parce que je ne suis pas gênée, les gens s’en contre fichent, ou à défaut, n’y portent pas leur attention. Le plaisir de m’agenouiller pour Lui servir à boire en plein festival, je ne suis alors qu’une excentrique parmi un monde déjà un peu moins chloroformé. Et me rendre compte, en me relevant, que personne ne m’a vraiment vue et que ce ne pourrait être que dans ma tête que cela dérange.
Peut-on se soumettre sans amour ?
Oui, par dévotion, par admiration, par un respect si grand que l’évidence amène à la soumission, non plus par choix « parce qu’Il veut que je me soumettre, parce que j’ai choisi de me soumettre » mais comme une nécessité : autrement, ce n’est pas possible, on ne peut l’envisager qu’ainsi.
Puis viennent les sentiments. Puis vient s’accrocher à ce vécu énormément d’amour … son lot de bonheur exacerbé et son pendant négatif m’amenant à être plus égocentrée, à l’écoute de ce grand amour, au détriment d’être à Son écoute.
Puis vient l’exigence qu’avant je centrais sur moi mais que j’amène à Lui. L’exigence d’un retour, d’un « truc » en plus car en moi les sentiments dévorent et parce qu’ils dévorent, il en faut toujours « plus ». Et même dans ce « plus », dans cette énormité de vie, dans l’inconditionnel bonheur, dans l’immensité de la vie : rien ne suffit.
L’amour est un poison à celui qui ne sait le diluer pour en extraire un élixir. Maintenant la lutte n’est plus qu’avec moi-même, elle est avec mon amour, et moi. Mais pour qui ? Pour qui lutté-je ?
Accepter d’être à sa place. A la place qu’Il nous a accordé être et ne rien vouloir d’autre.
« Ne rien vouloir mais œuvrer pour être ». La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
« Je veux le bonheur ». … « enlevez l’égo, enlevez la possession … il ne reste que le bonheur ». (phrase empruntée à un moine bouddhiste rencontré par le passé)
Dans la théorie c’est facile, dans la vie c’est un combat là encore.
Est-ce trop tard quand on tombe amoureux ?
Il me faut apprendre à L’aimer Lui, et non pas à aimer ce sentiment égocentré que je ressens pour Lui.
« Se détacher de la cupidité » – « En toute circonstance, chercher les sentiments impartiaux ». La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
C’est peut-être cela le plus difficile. Donner sans attendre un retour, sans reprendre parce qu’on regrette d’avoir donné « autant », ou qu’on aurait aimé avoir quelque chose en contrepartie.
C’est un apprentissage au long cours. Je pense même au fond de moi que c’est l’apprentissage d’une vie.
C’est accepter les remarques pour évoluer, pour avancer, pour ne que mieux L’aimer.
Dans l’idéal, j’aimerais vanter la facilité d’écoute, mais dans la réalité, apprendre est un effort de chaque instant et parfois j’aime éperdument, quand d’autres fois, j’exècre. J’exècre parce que j’aimerais que ce soit plus simple, j’aimerais avoir réussi, j’aimerais ne pas avoir fait d’erreur. Je voudrais déjà cette perfection, l’idéal. Je voudrais être celle que personne n’est. Mais je ne suis que moi (c’est déjà bien, non ? diraient certains. Non. Cela ne sera jamais assez bien. Et non pas par un trop plein d’exigences insensés, simplement parce que le jour où cela sera excellent, je n’aurai plus rien à apprendre. Et ce jour, même si je l’idéalise, je le vise, j’en ai très peur.).
C’est tellement plus facile quand un apprentissage devient naturel, qu’il s’ancre dans mon quotidien, dans ma servitude. Oui, mais après ?
Je dois aussi apprendre à me contenter de cela. Déjà énorme me dit-Il parfois.
Apprendre à aimer … c’est apprendre à L’aimer, mais aussi à aimer ce qui se vit sans rien chercher d’autre que l’instant où Lui et moi vivons.
Et ce n’est pas parce que cela existe déjà, qu’il n’y a plus de vie.
« Fais page blanche ». Baikal69
« Se réjouir de ce que l’on fait, ne jamais le regretter ». La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
Aimer à tout prendre : croquer la vie.
L’amoureuse de la vie que je suis est convaincue de l’idée que la vie mérite d’être vécue, qu’importe les embûches, même si elle est aussi belle que dégueulasse parfois.
Mais le plus difficile est sans doute de garder l’innocence qui fait qu’on se réjouit de tout. Et puis aussi de ne rien attendre, de ne rien imaginer. D’accepter la vie telle qu’elle vient, y être active pour qu’elle prenne un sens qui Lui et me convienne, mais sans pour autant chercher à la diriger dans un sens autre que celui qu’Il voudrait qu’elle prenne.
Lutter contre des volontés, lutter pour laisser ce contrôle. Lutter contre la déception quand ce n’est pas ce que j’attendais. Accepter de me laisser surprendre. Accepter de ne pas contrôler l’instant.
C’est ça vivre sa soumission : aller vivre chaque instant en y étant active, en Le faisant central dans ma vie, tout en acceptant, dans cette prise d’initiatives à Son égard, pour Lui, que ce ne soit pas toujours là où je l’attends qu’Il aura plaisir à vivre l’instant. Accepter que lorsque je pensais Lui faire plaisir, cela ne soit pas à Son goût momentanément et que ce ne soit pas un échec en moi-même. Je n’ai rien raté puisque j’ai pensé à Lui avant de penser à moi. Mais penser à Lui c’est accepter que ma pensée prenne un autre chemin que le mien, que ce soit Le sien qui l’emporte, qu’importe ce que j’avais imaginé.
Apprendre à vivre … essayer puis s’en aller en acceptant de changer de chemin.
Apprendre à attendre que chaque chose vienne si elle doit venir.
Faire cette page blanche pour me laisser surprendre. Apprendre à marcher dans ma soumission avant de vouloir courir.
Ancrer le bien, me délester du « mal » pour ensuite continuer de randonner sur Ses chemins et aller Le vivre sans même me rendre compte que ça, je ne l’avais pas imaginé.
Comme dans ces débuts où je ne souhaitais que Le vivre, prenant chaque seconde offerte de Lui, dans l’attente, comme le plus beau des cadeaux.
Mais on ne peut pas revenir en arrière. Alors quoi ? Tout cela est perdu ?
Non puisque je ne cesse de dire que tout ça, je n’aurai jamais imaginé pouvoir le vivre.
Non, juste accepter d’être heureuse et accepter de le mériter. Cesser de voir la vie comme un combat permanent. Même si …
« Les croyances ne font pas partie de la voie ». La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
Faire confiance. Lui faire confiance pour Nous faire confiance. J’y arrive dans Ses pratiques, comment aller Le vivre aussi intensément sinon ?
Pourquoi le doute s’installe quand On ne fait rien de particulier ?
L’action me rassure car j’existe, je sens mon cœur qui bat, je sens l’exaltation, je Le vis, Il existe dans mon esprit, dans chacune de mes pensées, et Il est à l’origine de mon bonheur.
L’inaction m’inquiète car je manque de prise sur la vie, d’un coup je ne suis que moi avec moi, ou moi avec Lui et moi. Je n’existe pas pour ce que je fais, pour mes compétences, mais simplement par ma présence. Quelle légitimité d’être quand on ne fait rien ?
Cette peur du vide, du néant, dans lequel ma tendance aime à aller sauter pour s’y noyer, se perdre dans l’égo, dans ses failles.
« Qu’est-ce que la confiance ? La confiance, c’est se fier à quelqu’un et lui abandonner quelque chose de précieux de soi. C’est un pari et un risque : on peut toujours se tromper sur la personne et être l’objet d’une trahison. La confiance peut se perdre du jour au lendemain. La plupart d’entre nous oscillent entre moments de confiance et doutes, tant la vie apprend la défiance. » (2020). Confiance, défiance, trahison: Colloque Gypsy XIX. Presses Universitaires de France.
Je ne pense pas douter de Lui, non, ce serait trop simple. Il est plus facile, et difficile à la fois, de manquer de confiance en moi. Défiance que je cache sous un fort caractère, un leadership certain … Et pourtant, au fond, pas sûre d’y croire. Ce n’est qu’une façade. Accepter que Lui ait vu au-delà de la façade et accepter d’apprendre à ne rien faire. Juste être à Ses pieds, et exister dans la passivité.
Apprendre à prendre soin sans attendre le même soin en retour et accueillir cette différence d’attention comme une pépite. Comme lire dans Ses yeux ce que les autres ignorent, comme ressentir ce que d’autres ne comprendront jamais, voir en Lui cette sensibilité extrême que la plupart ne voient pas.
« Penser à soi-même avec légèreté et penser au Maître avec profondeur. » – « Vivre le plaisir pour le Maître et non que pour soi ». – « S’exprimer sous forme de problématique et non de plainte ». La voie de la soumission, Baikal69 (2022)
Me soumettre, c’est m’accrocher. M’accrocher à la vie. M’accrocher à Son BDSM, m’accrocher à cette philosophie dans laquelle je crois et je suis convaincue.
C’est faire ce que je sais possiblement faire le mieux : aimer.
Mais apprendre à aimer sans aimer ce que je ressens, mais L’aimer comme Il souhaite être aimé. (Et non comme moi je souhaiterais L’aimer).
Et me faire toute petite … m’en aller avec Lui .. pour Le combler, et voyager ….
Sacré défi que de savoir aimer … comme celui de parvenir à vivre sa soumission.
Comme l’impression que cela vient briser des acquis en moi et l’impression de devoir accepter que cela se casse pour laisser construire ou se reconstruire la vie.
Et même quand je pense ne plus apprendre, j’apprends encore … et sans doute dans ces moments où je m’y attends le moins. Comme dans l’écriture de ce texte.