Les codes sociaux dans le BDSM ou dans les cordes
Note 1 : Dans le présent document, les termes employés pour désigner des personnes sont pris au sens générique, ils ont à la fois la valeur d’un féminin et d’un masculin.
Note 2 : Dans cet article, je vais essayer de vous parler des codes sociaux dans le BDSM ou dans les cordes selon mon point de vue.
Trop souvent j’entends des personnes dans le monde BDSM ou dans les cordes exprimés haut et fort qu’ils sont contre les codes, les protocoles (voir l’article sur “L’importance et la raison des codes et des protocoles”.
Je rappelle que les codes donnent des repères et du sens, les protocoles définissent les attitudes et les comportements.
Une relation BDSM ou de cordes n’est pas une relation vanille à l’instant de la scène ou de l’encordement, certes c’est une relation alternative. Alternative car elle demeure une alternative à la relation vanille. Ils n’ont aucune obligation de vivre leur relation alternative en 24/7, ils ont parfaitement le droit de ne vivre des épisodes de vie alternative.
Ils ne peuvent pas dire qu’ils sont contre les codes, contre les protocoles, car même s’ils ne font des épisodes, ils n’en demeure pas moins qu’au sein même de leurs épisodes, ils ont des codes et des protocoles, certes ce sont leurs propres codes et protocoles, mais ils ne peuvent nier qu’ils aient des codes et protocoles.
Geneviève d’Angenstein a dit : “La politesse et les codes sociaux sont là pour tenir l’affect à distance.” Ce qui prouve une fois de plus qu’un code mal maîtrisé peut s’avérer totalement contre-productif, voire pire. La maîtrise des codes demeure un élément fondamental d’une scène BDSM ou de cordes, ou d’une société BDSM ou de cordes qu’on vive cette relation d’une manière épisodique ou en 24/7.
La non-maîtrise des codes sociaux aura pour effet d’accroître l’exposition aux risques. Ces risques d’interprétation ou de manquement à l’étiquette qui, “parce qu’ils touchent à l’égo”, peuvent s’avérer lourds de conséquences. Il ne faut pas oublier que les codes sociaux sont là pour offrir à chacun un cadre relationnel “sécurisé”.
Les codes sociaux dans le BDSM ou dans les règles sont un ensemble de règles qui régissent les relations humaines, dans la sphère privée (épisodique ou en 24/7) ou dans celle d’une soirée. Il ne faut pas oublier que les codes sociaux ont une signification !
Il est vrai qu’en France, les codes sociaux prennent racines du Moyen-Age, lorsque se met en place, en France, une culture du comportement et de l’attitude fondée sur deux principes : le sens de la hiérarchie et celui de l’égalité ; deux principes antinomiques que la politesse permet de réconcilier. “Toutes les terminologies du type “s’il vous plaît”, “je vous remercie”, “je vous en prie”, etc., ont ainsi pour vocation de permettre à celui qui se trouve dans une position de supériorité – que ce soit sur le plan professionnel ou dans la sphère privée – de rehausser son interlocuteur. De rétablir, le temps de l’échange, une forme d’égalité” (Geneviève d’Angenstein). Si l’on change de culture, telle que le Maghreb ou l’Inde, culture patriarcale ces terminologies comme formule de politesse n’ont pas cours, puisqu’on considère que celui à qui la demande s’adresse est naturellement en position d’infériorité et donc, qu’il est légitime qu’il “serve”, contrairement en Occident, en France où le savoir-vivre vise à régler ce conflit hiérarchie-égalité.
Dans une société BDSM, qui n’est pas une société vanille, le rôle de la soumise étant de servir le Maître, et le rôle du Maître étant de servir la relation, on se retrouve dans le même cas qu’une culture patriarcale, à la différence que dans le cas du BDSM ou des cordes, nous sommes dans une culture du Maître d’Art. Comme la soumise sert le Maître, l’encordée sert l’encordeur (Je précise que je parle de corde dans le cadre d’une relation BDSM, je fais mes cordes dans une relation BDSM), ces terminologies, ces formules de politesse n’ont pas lieu d’être du Maître vers la soumise, ou de l’encordeur vers l’encordée.
“Autre fondement historique de notre système de savoir-vivre : le fait qu’en France, dès le Moyen Age, l’homme et la femme vivent ensemble, alors que dans beaucoup d’autres sociétés – asiatique, indienne, orientale… – ils évoluent séparément. Cette particularité française a eu pour effet d’obliger très tôt les hommes à restaurer une séparation symbolique avec les femmes en adoucissant leur langage et leurs manières en leur présence. Ce raffinement qu’on nous prête vient donc, à l’origine, de cette cohabitation historique. Les principes fondamentaux de cette politesse “Ancien Régime” – cette notion d’égalité homme-femme, cette réconciliation des principes de hiérarchie et d’égalité – demeurent aujourd’hui, et constituent encore les fondements de nos codes du XXIe siècle” (Geneviève d’Angenstein). à encore, c’est le cadre d’une société vanille et non d’une société BDSM ou de cordes.
La société BDSM ou de cordes, tout comme la relation BDSM ou de cordes est une relation hiérarchisée. Cette hiérarchie et cette maîtrise des codes sont nécessaires, ce sont des éléments absolument stratégiques sans lequel des méprises potentiellement lourdes de conséquences peuvent survenir. Un manque de code ou de protocoles, ou qu’un code ou protocole mal-maîtrisé peut s’avérer contre productif, peut casser une scène, une connexion, peut totalement changer l’intention que la personne dominante ou que l’encordeur avait.
La maîtrise des codes et des protocoles permet à la personne dominante ou à l’encordeur de rester dans le contrôle, dans la maîtrise de ce qu’elle fait !
Il ne faut pas oublier que le rapport au temps et à l’espace fait parti des codes et protocoles. Ces rapports peuvent aussi source de malentendus problématiques.
Le tutoiement et vouvoiement
Il existe aujourd’hui deux cultures dans le BDSM ou dans les cordes. Celle, noble, où l’on vouvoie et celle dite vanille dans laquelle tout le monde se dit “tu” dans une ambiance de pseudo-familiarité qui non seulement est généralement trompeuse mais qui peut même s’avérer dangereuse pour quelqu’un qui ne maîtrise pas les codes et qui va interpréter un tutoiement comme une disparition du lien hiérarchique, voire comme un signe de “pote”, ce qui ne sera évidemment pas le cas. Les gamers souvent, dès qu’ils appellent quelqu’un par son prénom, ou pseudo, il le/la tutoie. Les players, et tout particulièrement dans une relation Maître/esclave, le vouvoiement constitue un gage de liberté, même lorsqu’on use du prénom ou du pseudo. C’est ce qui permet de ne s’enfermer dans aucune familiarité ; de conserver une forme de neutralité dans le rapport à la personne. Chez les players, il se peut qu’un Maître use du tutoiement mais cela lui demande une grande maîtrise, un grand contrôle sur son BDSM, sur ses cordes, contrôle sur le fait de rester à sa place, de garder sa maîtrise, sa hiérarchie. Trop souvent je vois des dominants tutoyer les ou leur soumise, tout comme je vois des soumises ou esclaves tutoyer facilement leur personne dominante, et l’on peut se rendre compte que très vite la relation glisse d’une relation alternative à une relation vanille, relation qui glisse à cause d’un manque de maîtrise de la soumission ou de la domination.
La politesse dans une société ou relation BDSM ou de cordes s’appuie sur un faisceau de codes, de protocoles et de postures extrêmement complexe qui requiert beaucoup de subtilité : c’est un curseur à ajuster en permanence, ce qui n’est pas à la portée de tout le monde, ce qui demande beaucoup de maîtrise de de contrôle de sa posture. Depuis quelques années, il existe un véritable déni sur l’utilité de ces questions de savoir-vivre, de compétences, d’attitudes, de maîtrise et de contrôle de posture qui sont pourtant essentielles au fonctionnement d’une relation BDSM ou de cordes humaine.
Les codes et protocoles sont tout sauf une notion d’un autre âge. Aujourd’hui plus que jamais c’est un vecteur de cohésion sociale dans le BDSM et dans les cordes. Nombreux sont ceux qui, en France, ces dernières années, considèrent que le niveau d’expertise technique suffit.
Il faut bien comprendre qu’un manquement à l’étiquette touche à l’égo. C’est pourquoi il peut produire des effets désastreux.
En France, notre héritage catholique, et l’idée selon laquelle une faute confessée est immédiatement pardonnée, nous rend beaucoup plus arrangeants avec la morale.
Le protocole et l’affect
François Hollande, à la fin de son mandat, a manqué au protocole en ne raccompagnant pas le couple “sortant” jusqu’à sa voiture constituait une manifestation d’impolitesse typique.
La politesse et les codes sociaux sont là pour nous éviter de faire perdre la face à l’autre, pour tenir l’affect à distance et créer un terrain neutre, dépourvu de toute forme d’agressivité. Lorsque l’affect n’est pas tenu à distance lors d’une scène BDSM (surtout dans le SM) ou d’une corde (surtout dans l’aibunawa ou la semenawa), là il y a un gros risque d’incident ou d’accident. Face au couple Sarkozy, le nouveau président, François Hollande, a laissé l’affect l’emporter sur le protocole : il a manifesté une forme de condescendance. Et dès lors qu’on introduit de l’affect dans les notions de savoir-vivre on commet des erreurs de comportement qui peuvent conduire à des accidents.
Le protocole est là pour neutraliser les risques en fournissant un cadre relationnel sécurisé quels que soient les sentiments qu’on a les uns pour les autres. En sortir serait une faute grave. D’autant plus grave que dans les soirées, ou sur le net, les libertins, les personnes déviantes ou simplement les personnes cherchant un “coup sexuel” qui se disent BDSM et ayant une grande maîtrise et une grande expérience sont légions !
Source : Geneviève d’Angenstein
10 thoughts on “Les codes sociaux dans le BDSM ou dans les cordes”
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Cette article est trés réaliste,une majorité de personnes devrais en prendre conscience,celà eviterais bien des problémes.
Merci à vous pour cette article
Je ne suis pas du milieu mais je trouve votre article intéressant
Merci.
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