La différence entre Dominant(e) et Maître(sse)
Note 1 : Dans le présent document, les termes employés pour désigner des personnes sont pris au sens générique, ils ont à la fois la valeur d’un féminin et d’un masculin.
Note 2 : Dans cet article, je vais essayer de vous parler de la différence Dominant(e) et Maître(sse) dans le BDSM ou dans les cordes selon mon point de vue.
Souvent j’entends parler, poser la question, souvent on me demande aussi quelle différence entre un Dominant et un Maître ?
J’avoue entendre fréquemment des réponses qui manquent de rhétorique, du style “un Dominant est une personne qui n’a pas de soumise, un Maître est une personne qui a une soumise”.
Pour ma part, la différence se fait par l’étymologie déjà, Dominant vient du verbe dominer, Maître vient du verbe maîtriser.
Dominant
Une personne dans une relation, qui cherche et parvient à dominer l’autre. Dominer, c’est commander souverainement, avoir une puissance absolue ; exercer son autorité, son influence sur quelqu’un ; paraître le plus parmi d’autres choses, se faire le plus remarquer, être le plus fort ; montrer sa supériorité. On aura comme synonyme : assujettir, supplanter, surpasser.
Selon le Larousse : qui joue le principal rôle, qui domine. On retrouve donc là encore le rapport au verbe “dominer”, comme on trouve là le verbe “jouer”. Le verbe “jouer” nous ramène au gaming, donc au gamer. le verbe “dominer” est défini par le Larousse ainsi : exercer sur quelqu’un un ascendant, une influence, lui imposer sa volonté. On trouve donc chez le dominant la notion de gamer et le fait d’imposer sa volonté de manière autoritaire.
Dans ces définitions du Dominant, je ne vois aucune image de connexion, de relation allocentrée du Dominant au dominée, le fait que le Dominant serve la relation.
Maître
Dans les divers arts martiaux, le terme Maître désigne la personne expérimentée occupant le rôle de professeur ou de formateur. Nommé Sensei au Japon et Sifu en Chine. Wikipédia définit aussi le Maître, par un terme utilisé dans le BDSM pour désigner celui qui guide, éduque.
Selon le Larousse : personne qui dirige la conduite ; personne qui possède à un degré éminent un talent, un savoir, une connaissance et qui est susceptible de faire école, d’être prise pour modèle ; titre d’un artisan admis à la maîtrise, dans un métier où subsistent des traditions. On retrouve là les notions de direction, de talent, de connaissance, de maîtrise. Maître d’un point de vue étymologie vient du verbe “maîtriser”. Maîtriser, c’est se rendre maître d’une personne ou d’une chose, d’un événement, en contrôler le comportement ou le déroulement ; ne pas laisser transparaître ses sentiments ou ses émotions, réfréner ses réactions ; connaître parfaitement ; se dompter soi-même, dompter son esprit, son imagination, son caractère, son tempérament.
On trouve là les notions de retenue, de contrôle, de gestion, les notions de guide, de diriger avec bienveillance, les notions de talent, d’être un modèle.
Problématique de la dominance
En éthologie, la dominance sociale résulte des rapports de force entre deux ou plusieurs individus, établissant ainsi une hiérarchie sociale dans un groupe. Il a été démontré en éthologie que le maître ne doit pas être le dominant vis-à-vis de son chien. Il doit être un leader, un guide, mais avec des règles de vie.
La hiérarchie sociale ne peut exister que dans un même groupe social, dans une même espèce. Les hiérarchies de dominance n’existent pas, et ne sont qu’une projection humaine.
Une relation de coopération est possible entre le Maître et sa soumise, et exclure cette ancienne pensée de hiérarchie interspécifique n’empêche pas de mettre en place des règles de vie dans la relation, des règles que le Maître aura choisi. Charge donc à ce dernier de déterminer ces règles et de les enseigner à sa soumise pour qu’elle fasse ce qu’il souhaite, sans être obligé de les imposer par autoritarisme. Il est important que le Maître apprenne et comprenne la manière que sa soumise a de s’exprimer, ainsi que son langage corporel. Pour une bonne coopération, il est fondamental de respecter sa soumise en tant qu’être humain et vivant. Ce n’est pas parce qu’elle ne comprend pas ce que le Maître lui demande, que cela lie sa communication à une remise en cause du Maître.
Le fait de vouloir une relation de dominance entre le Dominant et la dominée installe obligatoirement une relation conflictuelle dans une finalité de gagnant/perdant, ou de persécuteur/victime. En effet, se sentant investis d’une mission, celle de dominer, les Dominants font souvent appel aux moyens qui leur semblent les plus évidents : l’objectif étant de faire autorité sur la dominée, ils ont tendance à contraindre la dominée dans certaines situations définies à l’avance. Par exemple, la dominée a interdiction de franchir une porte en premier, de s’asseoir sur le canapé, de dormir dans le lit, et elle doit en permanence être renvoyée à sa place, être repoussée fermement lorsqu’elle ose prendre une initiative.
Rapidement, devant le constat de ces premières difficultés à atteindre l’objectif fixé, vient se greffer la nécessité de l’obéissance. Il faut dominer la dominée et il faut la faire obéir : il faut donc qu’elle apprenne à être dominé en obéissant, en baissant les yeux. C’est le début du rapport de force entre le Dominant et la dominée, et bien que la dominée obtempère de temps à autre, c’est loin d’être parfait.
Ainsi, pour progresser, les sanctions et les punitions à l’encontre de la dominée désobéissante apparaissent. Les Dominants peuvent frapper, utiliser la force pour se faire obéir. Malheureusement, ils ne gagnent souvent qu’une dominée qui s’enferme dans la soumination, ou se rebiffe par la provocation ; leur comportement ne fait que rendre la dominée menaçante, voire agressive.
Différence entre un dominateur et un dominant
“homo homini lupus (l’homme est un loup pour l’homme )” (Thomas Hobbes) et il est même le pire prédateur pour ses congénères, quand il sent une vulnérabilité chez l’autre. Dominer pour ne pas être dominé, dévorer pour ne pas être dévoré. Ainsi agit le dominateur : il cherche à envahir le territoire de ses semblables pour agrandir le sien et soumet tous les plus faibles que lui. Ce besoin de domination se retrouve chez Hitler, Alexandre le Grand ou Napoléon qui, pour quelques obscures revanches sur la vie et les autres, étaient assoiffés de pouvoir. Il se retrouve aussi chez le conjoint, le patron, le collègue de travail et, pire encore, chez les parents. C’est la peur, les souffrances, les frustrations qui poussent à écraser les autres, parce qu’ils sont menaçants. Souvent humilié dans son enfance, par un père ou une mère abusifs, puis par les enseignants et les élèves, le dominateur a une revanche à prendre, une peur viscérale que ça recommence, un manque d’estime et de confiance qui le rendent agressif.
Le Dominant, lui il préserve sa zone de confort. Un dominateur est un dictateur et un dominant est un homme autoritaire.
Mais souvent la distance qui sépare le dominateur du Dominant est mince et fragile, souvent l’on voit des personnes passer de l’un à l’autre, et vice versa.
Personne n’est au-dessus de vous : c’est vous qui mettez les autres au-dessus. Personne n’est en-dessous non plus. Acceptez de considérer que vous êtes unique, avec de belles qualités, que vous perdez de vue quand quelqu’un vous fait croire que vous êtes en-dessous de lui : c’est vous qui lui donnez le pouvoir de vous détruire et vous pouvez le lui retirer. Pourquoi un dominateur ne s’approche jamais de certaine personne ? Parce qu’il sent qu’il n’aura pas le dessus et, de toute façon, il y a tellement d’autres personnes vulnérables et blessées à dominer.
Il vous faut donc dans le BDSM ou dans les cordes vous méfiez du dominateur. Pour le dominant c’est un jeu, pour le dominateur c’est une perversité.
Différence entre un Dominant et un Maître dans une scène BDSM ou de cordes
Dans une scène, si l’on observe bien, on verra que le Dominant va chercher à dominer. Il va aller chercher l’instant ou la personne dominée cessera de la défier, où la personne dominée acceptera qu’il soit “au-dessus” d’elle.
On voit souvent entre les deux personnes, une joute, une lutte à qui dominera l’autre. On peut lire dans le non-verbal de la personne dominée : “tu pourras faire ce que tu veux de mon corps, mais tu n’auras jamais mon esprit !”, dans le regard de la personne dominante : “je suis plus fort que toi, tu lâcheras, je te domine !”. Ce qui fait que l’on se trouve dans une relation nynégocentrée (préfixe nyn qui vient de nunc : maintenant, et le préfixe ego : je, moi. C’est donc une relation centrée sur moi je maintenant) il n’y a donc aucune connexion, les intentions sont égoïstes, dans une recherche de pouvoir sur autrui.
Alors que dans la scène, le Maître ne cherchera absolument pas à prendre le dessus sur la personne soumise ou encordée. Son travail est orienté sur ce que vit la personne soumise ou encordée, sur ce qu’elle ressent, sur son voyage. Il va l’accompagner, il va l’aider à partir dans son subspace.
Dans une relation Dominant / dominée, il n’y aura pas de subspace, ce sera une lutte, une recherche de pouvoir. C’est une relation temporelle, limitée à un temps partiel. Dans la relation de Maître / soumise, elle ira vivre un voyage, ce sera une expérience de l’esprit, elle voyagera dans son imagination. Là c’est une relation intemporelle, il y aura un “après”, c’est une ouverture sur l’avenir, sur le futur. La personne soumise ou encordée sera libérée d’un poids, sera apaisée, alors elle pourra s’ouvrir à l’avenir.
Conclusion
Posez-vous la question : que souhaitez-vivre comme scène, comme relation ? Une relation Dominant/dominé que vous soyez Dominant ou soumise, ou une relation Maître/soumise ? Quelle est votre recherche ? Un duel, une confrontation, vous prouver quelque chose ou une évolution, une ouverture sur l’avenir, un voyage intemporel ? Cherchez-vous à jouer ou un partage, un échange ? Souhaitez-vous lutter contre votre passé, votre présent ? Avez-vous des comptes à régler ? Souhaitez-vous vous prouver quelque chose ? Voulez-vous vivre une ordalie ? Voulez-vous vivre une expérience de l’esprit ?
Quoiqu’il en soit, il n’y aucun jugement de valeur, chacun est libre de vivre ce qu’il souhaite. L’important étant d’être conscient de ce que l’on veut vivre, de ce que l’on vit, d’être conscient de ce que l’on fait, d’être sincère, d’être honnête, d’être sécure.