Consentement : Cour européenne des droits de l’homme
Arrêt 17 février 2005, K.A. c/ Belgique
Un mari avait été condamné pour coups et blessures sur son épouse par une juridiction belge. Il attaque L’État belge en ce que celui-ci aurait porté atteinte à sa vie privée en le sanctionnant ainsi.
En effet, il se prévaut d’un contexte de sadomasochisme comme fait justificatif de son comportement, la victime des blessures demandant elle-même que l’auteur de celles-ci ne rende pas compte de son comportement devant le juge. L’État belge en s’y autorisant par le biais du droit pénal, aurait porté atteinte au droit à la vie privée, droit de l’homme protégé par la convention européenne des droits de l’homme.
La juridiction nationale, belge, a pourtant condamné l’auteur pour coups et blessures volontaires. La Cour de cassation belge estime que les pratiques sadomasochistes relèvent en règle générale de la vie privée, protégée par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, mais que ce texte admet néanmoins que le législateur national intervienne pour les interdire s’il estime que cela relève de la protection de la santé de la personne ou de la morale.
L’auteur des actes condamné pour ces faits a saisi la Cour européenne des droits de l’homme pour atteinte à son droit à la vie privée, ces pratiques ayant eu lieu à son domicile conjugal puis dans des clubs privés.
Le Gouvernement, défendeur à l’instance, justifie l’ingérence dans la vie privée du couple pour la protection de la personne faisant l’objet de ces pratiques, qui sont des actes de torture.
La Cour européenne des droits de l’homme rappelle que la vie sexuelle est une composante de la vie privée, protégée à ce titre par la Convention. C’est pourquoi un Etat ne peut porter atteinte au droit à la vie privée, prévu à l’article 8, que si « les juridictions nationales ont soulevé la question, en l’espèce dans le cas concret considéré du « consentement de la victime ».
En outre, le droit à la vie privée de l’article 8 comprend le « droit à l’épanouissement personnel », y compris dans le domaine des relations intimes, ce qui peut engendre un droit d’opérer des choix concernant son « propre corps ». La Cour en conclut que « le droit pénal ne peut en principe intervenir dans le domaine des pratiques sexuelles consenties, qui relèvent du libre arbitre des individus », sauf « des raisons particulièrement graves », ici en l’espèce réunies, puisque l’épouse demandait sans succès l’arrêt des blessures qui lui étaient infligées et était ainsi privée du moyen d’arrêter « une escalade de violence ». Ce n’est que dans la mesure où dans l’espèce l’auteur des blessures a continué malgré la demande d’arrêt du masochiste, que la Cour estime que la condamnation du premier par le juge pénal belge est justifiée.
Suite de l’article : La contrainte consentie : après le DSM-5, quelle thérapie BDSM ?
Document original : mafr Marie-Anne Frison-Roche (professeure de droit économique à l’Institut d’études politiques de Paris et spécialiste du droit de la régulation dont elle a contribué à fonder la doctrine en France)
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