Comment utiliser son autorité dans une relation BDSM ?
Note : Dans le présent document, les termes employés pour désigner des personnes sont pris au sens générique; ils ont à la fois valeur d’un féminin et d’un masculin.
Comment utiliser son autorité afin d’amener sa personne soumise dans une soumission active ?
Il y a 3 formes d’autorité :
L’autorité autoritariste :
C’est à l’autorité autoritariste que les Dominants ou maîtres font majoritairement référence lorsqu’ils emploient communément le terme “autorité” .
Autrement dit, la conception autoritariste est l’autorité dans son sens commun. Le détenteur d’une fonction statutaire exerce une domination sur la personne soumise afin d’obtenir d’elle une obéissance inconditionnelle, sous la forme d’une soumission. Cette volonté de domination est une volonté de détenir un pouvoir indiscuté, d’avoir une emprise totale sur la personne soumise dans une forme de toute puissance. Car la volonté s’impose unilatéralement, sans discussion ni explication, dans un “rapport” de force et non dans une “relation” . En l’absence d’échange et encore moins de consentement, la personne soumise n’est pas prise en compte comme sujet, mais comme objet, c’est l’objetisation de la personne soumise.
L’autorité autoritariste a recours à différents moyens : usage de la force physique, pressions psychologiques diverses exercées sur la personne soumise qui jouent sur la séduction (autorité dite “charismatique” ), sur la culpabilisation et le chantage à l’amour en réactivant l’angoisse d’abandon du sujet ( “phénomène autorité” si bien analysé par Gérard Mendel (1971) ). L’autorité dite « naturelle » est à ranger dans cette catégorie.
On retrouve cette forme d’autorité dans l’éducation anglaise.
Conséquence : cette autorité pousse la personne soumise dans la rébellion, dans la provocation. Elle ne génère pas du lien, de la relation.
Exemple : la cigarette
Une personne soumise fume, elle fume 15 cigarettes par jour en moyenne, le Maître lui ne fume pas. Le Maître se rend vite compte que la cigarette nuit à sa domination, dans le fait qu’elle va sans cesse fumer, que la cigarette passe et passera toujours avant lui. Il devient soumis à la cigarette de sa soumise.
Dans l’autorité autoritariste, le Maître va lui dire : « Stop ! tu ne fumes plus ! Tu arrêtes la cigarette ! Je me refuse d’être soumis à ta cigarette ! »
L’autorité évacuée :
À partir des années 1960, un vent de contestation anti-autoritaire souffle au sein des sociétés occidentales. La jeunesse se révolte, les femmes s’émancipent, les autorités traditionnelles (État, armée, police, Église, école…) sont désacralisées. Dans la famille, l’école, l’entreprise, les structures pyramidales et la hiérarchie s’estompent. Dans les relations de travail ou personnelles, la négociation et la communication priment sur les injonctions autoritaires.
Les philosophes et les sociologues sont unanimes à diagnostiquer ce processus comme un déclin général de l’autorité.
Toute autorité repose sur l’existence d’un “tiers” invisible (la loi ou l’État, figures symboliques du père). Dès lors que tous les autres mythes politiques se sont effondrés, il ne reste plus que les droits de l’homme pour fonder une souveraineté légitime.
Cette autorité génère une crise qui ne permet pas à la personne soumise d’advenir comme sujets situés à sa place, différenciée du Dominant et/ou du Maître. Ainsi, les frontières entre Dominants ou Maîtres et soumis se brouillent. Les Dominants ou Maîtres n’assument plus l’asymétrie inhérente à leur posture. Les places respectives peuvent même s’inverser, lorsque la personne soumise a le dernier mot, elle tentera en vain de se fixer ses propres limites.
Le refus permanent du Dominant ou du Maître de toute situation conflictuelle – de peur de ne plus être aimé – laisse la personne soumise face à l’angoisse d’abandon ou à l’angoisse de fusion.
Conséquence : cette autorité pousse la personne soumise dans la soumination, et la personne dominante dans la doumination. Il y aura un refus du “non” , la personne soumise n’acceptera pas d’être contredite, n’acceptera pas la frustration, l’humiliation…
Exemple : la cigarette (comme dans l’autorité autoritariste)
Une personne soumise fume, elle fume 15 cigarettes par jour en moyenne, le Maître lui ne fume pas. Le Maître se rend vite compte que la cigarette nuit à sa domination, dans le fait qu’elle va sans cesse fumer, que la cigarette passe et passera toujours avant lui. Il devient soumis à la cigarette de sa soumise.
Dans l’autorité autoritariste, le Maître va lui dire : « Stop ! tu ne fumes plus ! Tu arrêtes la cigarette ! Je me refuse d’être soumis à ta cigarette ! »
Dans l’autorité évacuée, le Maître va lui interdire de fumer, ce qui ne sera pas possible pour elle. Elle reviendra à la charge, il finira par fermer le yeux, et la laissera aller fumer quand elle veut, elle ira fumer à sa guise.
L’autorité éducative :
À partir de son étymologie, l’autorité se définit selon une nouvelle logique qui dépasse l’alternative proposée au Dominant ou au Maître – autorité autoritariste ou autorité évacuée – source d’impasse. Elle se révèle au fondement de l’humain (Marcelli, 2003) comme phénomène à la fois psychologique et relationnel (social), dans une triple signification indissociable : être l’autorité (autorité statutaire – potestas), avoir de l’autorité (autorité qui s’autorise – auctor – et fait grandir l’autre – augere) et faire autorité (autorité de capacité et de compétence) (Obin, 2001).
L’autorité statutaire (potestas) :
C’est le pouvoir dont sont investies les personnes Dominantes à raison de la fonction qu’elles remplissent dans le cadre de la relation déterminée et consensuelle.
Une autorité non négociable mais non suffisante, elle demeure potentielle : pré-existant à la personne Dominante, elle ne suffit pas à elle seule à lui garantir l’exercice d’une autorité effective.
On peut comprendre la confusion que font certains Dominant avec le pouvoir. Si la personne Dominante en reste à cette signification univoque, il court le risque d’un raidissement inopérant de sa position statutaire, qui peut basculer vers la force, donc le pouvoir. Et nous savons que cette violence “institutionnelle” génère très souvent une violence réactionnelle de la personne soumise.
L’autorité de l’auteur, qui s’autorise et augmente l’autre
Cela nous ramène à l’étymologie première « auctor ». Avoir de l’autorité en tant que personne, c’est avoir cette confiance suffisante en soi, c’est être suffisamment maître de sa propre vie pour accepter de se confronter à une personne soumise avec son savoir et ses manques, en ayant le souci de lui ouvrir des voies non tracées à l’avance vers sa soumission active, de l’aider à anticiper les ordres ou demandes du Maître, lui permettant de s’ouvrir à une soumission active, ce qui nécessite un espace-temps important.
Celui qui a une telle autorité peut être vécu comme une personne Dominante bienveillante, comme un Maître car il a aidé sa personne soumise à essayer de le servir, c’est-à-dire en acceptant que la personne soumise connaisse son Maître mieux que lui-même ne se connait. Il est capable de prendre de la distance, en posant sur elle un regard nouveau. Il fait durablement autorité s’il sait garder sa part d’Anima BDSM.
Un tel auteur sujet de sa propre existence se construit à travers une histoire singulière où est présent l’ “être” au sens clinique. Tâche jamais achevée, l’indispensable travail d’élucidation de son histoire développe la confiance suffisante en soi, affermit la personnalité ainsi disposée à s’affirmer dans sa relation avec sa soumise.
L’autorité de capacités, de compétences :
L’autorité est avant tout capacité fonctionnelle. Ainsi, l’autorité pose la question essentielle du “faire” . Cette autorité résulte d’une construction de savoirs dans l’action.
C’est avoir la compétence et la capacité de “faire être” et de “faire faire” :
- “faire être” : pour que la personne soumise soit réellement soumise ;
- “faire faire” : pour que la personne soumise puisse réaliser sa soumission dans la servitude de la personne Dominante.
Exemple : la cigarette (comme dans l’autorité autoritariste et dans l’autorité évacuée)
Une personne soumise fume, elle fume 15 cigarettes par jour en moyenne, le Maître lui ne fume pas. Le Maître se rend vite compte que la cigarette nuit à sa domination, dans le fait qu’elle va sans cesse fumer, que la cigarette passe et passera toujours avant lui. Il devient soumis à la cigarette de sa soumise.
Dans l’autorité autoritariste, le Maître va lui dire : « Stop ! tu ne fumes plus ! Tu arrêtes la cigarette ! Je me refuse d’être soumis à ta cigarette ! »
Dans l’autorité évacuée, le Maître va lui interdire de fumer, ce qui ne sera pas possible pour elle. Elle reviendra à la charge, il finira par fermer le yeux, et la laissera aller fumer quand elle veut, elle ira fumer à sa guise.
Dans l’autorité éducative, le Maître lui dira : « tu fumes, c’est une addiction, je sais que je ne peux pas lutter contre ton addiction, je vais donc faire avec ton addiction ! Je t’autorise à fumer 14 cigarettes par jour (elle fumait 15 cigarettes par jour en moyenne) ! Chaque matin en te levant, tu mettras 14 cigarettes dans un paquet vide, elles devront te faire la journée ! De plus, je t’interdis de fumer plus d’une cigarette par heure ! Et tu devras me demander l’autorisation pour fumer chaque cigarette ! » Ainsi le Maître garde l’acte décisionnel, il est le décideur, agissant de la sorte, il permet à ce que chacun soit gagnant-gagnant dans sa décision. Il garde le contrôle de la cigarette de sa soumise.
Dans ce exemple d’autorité éducative avec la cigarette :
-
l’autorité statutaire se retrouve dans le fait que c’est lui qui décide, et qui garde le contrôle de la cigarette de sa soumise ;
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l’autorité de l’auteur, qui s’autorise et augmente l’autre, dans le fait qu’elle fumera une cigarette de moins par jour, et qu’elle ne fumera pas plus d’une cigarette par heure ;
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l’autorité de capacités, de compétences, dans le fait qu’elle lui demande à chaque fois pour aller fumer ( « faire être » ) et qu’elle peut réaliser sa soumission en lui obéissant malgré son addiction à la cigarette ( « faire faire » ).
Conclusion
La personne dominante se promènera dans l’aire de ce triangle en fonction de la situation.
Selon moi, être Dominant, maîtriser sa Domination passe par une autorité éducative. Nous avons en tant que Dominant ou Maître, une double obligation :
- de sécuriser et de protéger la personne soumise qui nous fait don de sa personne ;
- d’éduquer la personne soumise dans sa soumission active.
Il ne faut pas oublier que la personne soumise sert le Dominant ou le Maître, et que le Dominant ou Maître sert la relation.
La sécurité et la protection de la personne soumise :
L’autorité autoritariste permet d’obtenir une réaction immédiate de la personne soumise lors d’une situation dangereuse pour elle, pour la relation, pour la personne dominante. Il faut donc utiliser cette autorité pour cette seule raison.
L’éducation dans une soumission active :
L’autorité éducative permettra d’éduquer sainement la personne soumise. Lui faire prendre conscience d’elle-même, de sa soumission, l’aidera à ce qu’elle prenne le contrôle de sa soumission dans le but de nous servir.
Elle doit apprendre à anticiper nos ordres, nos demandes, nos attentes.
La soumission sera pleinement active lorsqu’elle aura acquis cette anticipation nécessaire à l’évolution de la relation.
Cette soumission active permet de décharger la personne Dominante, elle nous permet de prendre conscience que la personne soumise a atteint un palier. On peut alors rediriger notre énergie, vers un nouveau palier, ce qui permet de faire évoluer la relation.
On peut trouver ou retrouver de l’autorité évacuée à certain moment dans une relation BDSM éducative. Lors d’une fatigue physique ou mentale, lorsque la personne Dominante est préoccupée par des éléments extérieurs à la relation BDSM, il peut avoir recours à l’éducation évacuée. Si la personne soumise est dans une soumission active, elle devrait prendre conscience de la préoccupation de la personne Dominante et elle se mettra pleinement dans sa soumission active afin de s’auto-gérer, pour décharger la personne dominante.
2 thoughts on “Comment utiliser son autorité dans une relation BDSM ?”
Vivre une soumission éducative pour moi, correspondrait à un début et une fin de ma recherche d’un Maître. Parce que, je trouve que depuis que je me cherche dans ce milieu, et, bien j’évolue en lisant les articles, et, en discutant avec des Maîtres et des soumises : ils m’apportent beaucoup. Même si défois je les taquine, où je les cherche un peu. Je vous remercie de m’avoir toujours accepté Mr les maîtres.